Qu'est-ce que la sécheresse ?

La sécheresse définit l’état d’un environnement confronté à un manque d’eau significativement long et important pour qu’il ait des impacts sur la flore, la faune et la société. Elle résulte souvent de la combinaison :

- d’un manque d’eau (déficit pluviométrique, manque d’eau dans le sol ou les cours d’eau) ;

- de températures élevées ;

- d'une trop grande consommation d’eau.

Elle survient lorsque la quantité de pluie des saisons passées est déficitaire et/ou que les prélèvements en eau dépassent la quantité d’eau disponible. Le manque de pluie l’hiver ou au printemps empêche le bon remplissage des nappes d’eau souterraine qui viennent soutenir le débit des cours d’eau pendant l’été. Les températures de l’air élevées ont pour conséquence une évaporation plus importante de l’eau disponible et un assèchement des sols.

Pour aller plus loin :

- le cycle de l’eau

- sécheresse et changement climatique

Les épisodes de sécheresse ont de multiples impacts sur les milieux aquatiques, consécutifs à la baisse des niveaux d’eau. La biodiversité est directement touchée, et souffre aussi de la détérioration de la qualité de l’eau suite à l’échauffement et à la moindre dilution des pollutions. Les usages qui dépendent d’un niveau d’eau suffisant peuvent être fortement touchés.

Le fonctionnement des milieux aquatiques en période d’étiage :

L’étiage d’un cours d’eau est parfois assimilé aux basses eaux saisonnières, mais il est plus juste de le définir comme le débit exceptionnellement faible d’un cours d’eau, c’est-à-dire l’exacerbation de ces basses eaux.

L’étiage est ainsi considéré comme une période limitée dans l’année où les débits passent en dessous d’une valeur seuil, propre à chaque cours d’eau et calculée statistiquement.

crédit photo Thierry Degen / Terra

Contrairement aux crues qui sont des épisodes hydrologiques relativement rapides (quelques heures à quelques jours), les étiages naturels ont des dynamiques plus lentes et sont le résultat de phénomènes hydro-météorologiques, conduisant à la baisse des débits, qui s’étendent sur plusieurs semaines à plusieurs mois.

La diminution des débits des cours d’eau est la conséquence de multiples phénomènes, dont l’augmentation des températures, la diminution des apports d’eau souterraine, les prélèvements… qui induisent un accroissement de l’évapotranspiration.

Cette augmentation des températures peut être combinée à une baisse saisonnière des précipitations, limitant d’autant plus la disponibilité en eau pour l’écoulement.

Ceci provoque la diminution des niveaux des eaux souterraines et des rivières - appelée tarissement - aboutissant à des situations d’étiage d’autant plus importantes qu’elles se prolongent dans le temps. D’autant que les processus à l’origine des étiages peuvent remonter à des saisons antérieures (avec un hiver précédent déficitaire en pluie, une nappe souterraine qui s’est peu rechargée, par exemple) et que cette genèse longue explique la difficulté à déterminer les facteurs de leur apparition et leur sévérité.

Les prélèvements d’eau en rivière pour différents usages (irrigation, eau potable, énergie, industrie, etc.) peuvent également avoir un impact conséquent sur les débits.

Quelles conséquences sur la biodiversité ?

Quand la quantité diminue, la qualité également… La sécheresse a des impacts sur la qualité des eaux. Elle crée un risque de pollution de la ressource car sa capacité de dilution des rejets est moindre. L’augmentation des températures favorisent également le développement des algues et des cyanobactéries…

Tous les milieux naturels aquatiques et terrestres, habitats et espèces protégés ou non, sont impactés par le manque d’eau. Les organismes de ces milieux sont adaptés mais l’aggravation des sécheresses en durée et en intensité, ainsi que leur récurrence, affectent durablement la biodiversité qu’ils hébergent.

La recolonisation des milieux n’est pas systématique. Les impacts non réversibles suite à une sécheresse sont majoritairement la perte de la diversité avec la diminution du nombre d’individus d’une espèce ou la disparition d’espèces.

Ainsi, au cours de l’été 2022, la réserve naturelle de Vauville a vu s’élever la température de l’eau, entraînant une dégradation de la qualité de l'eau, puis l’assèchement complet de la mare. La réserve héberge 13 espèces protégées d'amphibiens, dont 4 sont menacées de disparation. Les comptages effectués en période post-nuptiale à l'automne 2022 ont fait état d'une baisse de 64% du nombre d'individus.

crédit photos : réserve naturelle de Vauville

Le manque d’eau entraîne davantage de dysfonctionnements dans les petits et moyens cours d’eau, en amont des bassins versants, que dans les grands cours d’eau de plaine, en raison de leur plus grande sensibilité aux conditions climatiques instantanées (pluie et température). Les impacts sont spécifiques à chaque cours d’eau, mais les principales conséquences sur les habitats et le fonctionnement des milieux aquatiques sont :

> la fragmentation des cours d’eau (ou la rupture de la continuité écologique) : la baisse du niveau d’eau dans les rivières peut rendre certains obstacles, naturels ou non, infranchissables par les espèces aquatiques, peut supprimer des connexions entre plusieurs parties d’un cours d’eau ou restreindre l’accès aux milieux annexes.

Cette fragmentation des milieux peut empêcher la mobilité des espèces comme les poissons ou les amphibiens, en particulier jusqu’à leur lieu de frayère, qui voient ainsi leur cycle de vie se trouver bloqué à des périodes critiques. À titre d’exemple, le département de la Manche abrite de nombreux cours d’eau susceptibles d’accueillir les poissons migrateurs (saumon, anguille, truite...) dont les populations sont menacées et qui sont particulièrement sensibles à la fragmentation des cours d’eau  :

Le stade le plus sévère de l’étiage est l’assèchement complet d’une partie du linéaire de la rivière, provoquant directement la mort de toutes les espèces peu mobiles et incapables de survivre au manque d’eau. La biodiversité subit ainsi directement les conséquences des assèchements sévères.

> l’élévation de la température de l’eau : la réduction de la vitesse de courant et de la hauteur d’eau rend les cours d'eau plus sensibles à la température de l’air et à l’ensoleillement. L’élévation de la température peut alors modifier directement la physiologie de certains organismes pouvant aboutir à leur mort en cas de stress thermique très important, et modifier les équilibres biologiques (phénomènes d’eutrophisation, développement de cyanobactéries, augmentation de la virulence de certains agents pathogènes...).

> l’altération de la qualité de l’eau. La diminution du débit favorise l’augmentation de la température de l’eau, avec des conséquences directes sur la qualité physico-chimique de l’eau. Par exemple, la quantité d’oxygène dissous dans l’eau diminue lorsque sa température augmente. En outre, dans la mesure où les rejets dans les milieux interviennent toute l’année, indépendamment d’épisodes de sécheresse, la baisse des débits conduit souvent à une moindre dilution et une évacuation plus limitée des substances rejetées, augmentant ainsi leur concentration dans certaines portions de cours d’eau, et entraînant une altération de la qualité de l’eau.

La biodiversité est directement touchée par cette dégradation de la qualité de l’eau : diminution de l’activité des poissons suite à l’élévation de la température, développement plus important d’algues microscopiques, épisodes d’asphyxie, etc.

> l’accélération de la prolifération d’espèces exotiques envahissantes : face aux sécheresses récurrentes, c’est l’ensemble du cortège faunistique et floristique qui est modifié, avec une disparition des espèces autochtones les plus sensibles au profit d’espèces plus tolérantes comme les invasives.

Ces phénomènes associés à la sécheresse peuvent aussi avoir des impacts sanitaires. Les proliférations d’algues sont susceptibles de conduire à des rejets de gaz toxiques, rendant dangereuse la pratique de la baignade ou d’activités au contact de l’eau telle que la pêche. La dégradation de la qualité de l’eau implique des surcoûts de traitement pour sa potabilisation, et peut même conduire à une eau impropre à la consommation.

De manière générale, la dégradation de la qualité de l’eau impacte tous les usages de l’eau et des milieux aquatiques, en particulier ceux qui se déroulent dans le milieu, comme par exemple la pisciculture d’étang.